Publié le 23 mai 2012

De l'enflure verbale grotesque


«La jeunesse québécoise.» Je la côtoie tous les... (PHOTO : SIMON SÉGUIN-BERTRAND, LE DROIT)
«La jeunesse québécoise.»
Je la côtoie tous les jours, la jeunesse québécoise,
laissez-moi vous dire qu'une bonne proportion de cette jeunesse
est totalement frustrée d'être associée au mouvement de grève étudiante.
PHOTO : SIMON SÉGUIN-BERTRAND, LE DROIT
 

Christian Larochelle
L'auteur est un livreur de Montréal.

La Presse

Wô les moteurs! Le vase a débordé quand j'ai entendu les réactions à l'adoption de la loi spéciale 78. L'enflure verbale, les exagérations grotesques, la manipulation des faits et le chantage: plus capable! Voici quelques perles entendues, ici et là.

«Jour noir pour la démocratie». À ce que je sache, le droit de vote d'un adulte, homme ou femme, peu importe la couleur, la religion, l'orientation sexuelle, le travail, est maintenu à 100% au Québec. Une association étudiante qui réclame les deux tiers des votes pour annuler une grève, c'est ça la démocratie?

«Élimination des libertés fondamentales.» Il n'y a nulle part dans cette loi un article qui enfreint quelque liberté fondamentale. Vous pouvez vous associer, vous pouvez manifester, vous pouvez avoir des opinions. Seulement, vous allez devoir le faire de manière acceptable pour l'ensemble de la société, pas juste de manière à exciter 17% de la population étudiante en grève.

«La jeunesse québécoise.» Je la côtoie tous les jours, la jeunesse québécoise, laissez-moi vous dire qu'une bonne proportion de cette jeunesse est totalement frustrée d'être associée au mouvement de grève étudiante.

«LA population étudiante.» Taux des étudiants en grève: 17%. J'insiste: 17%, OK?

«Protéger les acquis de la société.» Avez-vous manifesté avec les travailleurs d'Aveos? Allez-vous être là quand MABE et Westinghouse vont fermer dans quelques mois? Une pensée pour les ex-employés de Shell? Je vous dis ça à vous, mais dans le fond, ça s'applique à tellement de gens qui n'en ont tellement rien à foutre de la dure réalité des autres, jusqu'au moment où la vie les rattrape, eux.

«Des étudiants vont être poursuivis au criminel.» Oui, seulement s'ils décident de commettre un acte criminel. Au même titre qu'un éboueur, un professeur, une mère de famille, un médecin, une ingénieure, un acteur, une vétérinaire...

«Le gouvernement devra répondre des actes de violence qui pourraient être commis.» Là, je décroche. Tant qu'à y être, violez une femme sur la rue, vous n'aurez qu'à dire qu'elle l'a cherché, habillée comme ça...

«Le gouvernement a englouti 190 millions dans la crise, il aurait dû mettre cet argent dans la gratuité.» Quelle logique! Tiens, je vais aller voir mon banquier, je vais lui dire: «Vous devriez me donner 5000$, parce que de toute façon, si je brise vos vitrines, vous allez le dépenser cet argent...»