Paul Gérin-Lajoie souhaite un retour en classe

Mathieu Turbide

Journal de Montréal

20 mai 2012

pgl

Le doyen des ministres de l’Éducation, Paul Gérin-Lajoie, enjoint les étudiants à cesser leur boycott et à retourner en classe.

À 92 ans, cet artisan de la Révolution tranquille se désole des manifestations « pas très tranquilles » qui dégénèrent et espère que la loi spéciale du gouvernement Charest réussira à mieux encadrer les manifestations, surtout aux abords des cégeps et des universités.

Rencontré par le Journal hier, lors de la finale internationale de la Dictée PGL, qu’il a créée il y a 21 ans, M. Gérin-Lajoie, qui a été le tout premier titulaire du poste de ministre de l’Éducation, de 1964 à 1966, réitère son appui au gouvernement Charest, malgré le « méli-mélo » qui prévaut en ce moment.

Q La crise qui perdure actuellement au Québec, j’imagine que ça ne vous laisse pas indifférent ?

R Ça ne me laisse sûrement pas indifférent. J’ai suivi les choses depuis le début. Là, malgré le méli-mélo à l’heure présente, j’ai confiance que la loi du gouvernement Charest va réussir à calmer les positions de chacun et que les élèves ne perdront pas leur année scolaire, surtout dans les cégeps, et qu’ils pourront au contraire compléter leur cégep pour entrer à l’université, pour ceux qui ont choisi cela. Pour ceux qui ont choisi un parcours professionnel, c’est aussi très important. Il faut qu’ils puissent compléter cela.

Q Vous vous êtes déjà prononcé pour un réinvestissement dans les cégeps et les universités et en accord avec la position du gouvernement Charest dans ce dossier, notamment en ce qui concerne la hausse des droits de scolarité. Après trois mois de conflit, c’est toujours votre position ?

R Bien sûr. Les chiffres qui ont été donnés récemment sont absolument justes. Il faut que les universités reçoivent des sommes supplémentaires pour remplir leurs fonctions de recherche et pour remplir leurs fonctions d’enseignement, un enseignement de qualité, ce qui veut dire un assez grand nombre de professeurs, ce qui veut dire également que les professeurs soient bien qualifiés, se comparent à ce qu’il y a de mieux dans d’autres institutions dans le monde.

Votre biographie s’appelle Le Révolutionnaire tranquille. La révolution à laquelle vous avez participé s’appelle la Révolution tranquille. Quand vous voyez des jeunes sortir dans la rue et utiliser des moyens pas toujours tranquilles pour se faire entendre, est-ce que ça vous inquiète ?

R Bien, cela me désappointe fortement. Parce que quand les étudiants sont en grève, ils ne sont pas en classe. Et quand ça dure trois mois, c’est une longue période. Je souhaite que les élèves, les étudiants retournent en classe.

Q Vous avez beaucoup travaillé dans le Tiers-monde, notamment en Afrique : est-ce que cette expérience vous fait penser qu’on a au Québec un bon système d’éducation, ouvert et disponible ?

R Absolument. Les frais de scolarité, même avec l’augmentation qui a été décrétée, ça demeure meilleur marché que partout au Canada, aux États-Unis et même dans des pays européens. D’ailleurs, incidemment, les pays qui ont la gratuité comme en France s’interrogent beaucoup sur cette question-là. En France, pour pallier le manque de qualité de l’enseignement public au niveau universitaire, des écoles d’administration publique, de génie et autres études commerciales demandent, elles, des frais de scolarité importants. Alors au Québec, quand on a étudié ce problème-là, on exige des droits de scolarité qui ne sont pas énormes, même avec l’augmentation. Je pense qu’on doit s’estimer chanceux du système qu’on a. Il y a des gens qui préconisent même la gratuité complète. Je ne suis pas de ceux-là. Et la gratuité, dans les pays où ça a été instauré, est loin d’aboutir à des réussites importantes des étudiants.

Vidéo : http://m.journaldemontreal.com/video/1648099572001?url=2012/05/20/paul-gerin-lajoie-souhaite-un-retour-en-classe