OCDE

Publié le 18 juin 2012

L'OCDE est contre le gel

Alain Dubuc
La Presse

L'Organisation de coopération et de développement économiques vient tout juste de publier son étude annuelle sur le Canada. Elle porte essentiellement sur le grand défi économique du Canada : l'augmentation de la productivité.

Cette étude comporte deux grands chapitres, qui traitent des deux avenues proposées pour y parvenir, promouvoir l'innovation et développer l'éducation supérieure. Dans le chapitre sur l'éducation, l'OCDE aborde en détail des thèmes qui ont été au coeur du débat qui fait rage au Québec - le financement des universités, l'accessibilité, les droits de scolarité.

Et que dit l'organisme international? Il donne totalement raison à tous ceux qui estiment que les hausses des droits sont raisonnables, socialement justes, et sans effet sur l'accessibilité.

Pour le reste de cette chronique, je m'efface devant cette étude que je vais citer abondamment. Certaines citations proviennent du résumé français, d'autres sont une traduction de la version longue anglaise.

«Compte tenu des évolutions démographiques à long terme, il faudra que le taux de scolarisation dans l'enseignement supérieur continue d'augmenter pour maintenir l'offre de main-d'oeuvre qualifiée.» (Un dossier où le Canada a du rattrapage à faire, avec un taux de diplomation de 36,9 % contre 38,6% pour l'OCDE. Le Québec, au septième rang au Canada, est à 33 %.)

«Dans la mesure où les jeunes seront à l'avenir de moins en moins nombreux, cela signifie que pour augmenter l'offre de travail qualifié, il va falloir encourager le taux de fréquentation de l'enseignement supérieur des catégories actuellement sous-représentées, comme les étudiants de familles modestes et peu diplômées...»

«Le montant relativement modeste des droits d'inscription et le système de prêts étudiants parviennent globalement, ensemble, à annihiler en grande partie l'influence du revenu parental sur le choix de poursuivre des études supérieures.» (L'étude parle du Canada, où les droits moyens sont de 5300 $, soit bien plus que les 3946 $ qu'ils atteindront au Québec dans sept ans).

«Des droits de scolarité élevés ou en croissance ne posent pas, en soi, une barrière significative aux étudiants aux revenus bas ou modestes s'ils sont compensés adéquatement par une assistance financière.»

«La décision de poursuivre une éducation supérieure repose sur plusieurs facteurs, incluant les conditions du marché du travail, les attitudes parentales à l'égard de l'éducation supérieure, la performance académique et la littératie, la présence d'éducateurs stimulants, la localisation des institutions et les barrières financières.»

«Cependant, à mesure que la recherche sur l'accès aux études supérieures a progressé, il est devenu plus évident que des barrières comme la situation des parents (particulièrement leur niveau d'éducation) et la performance à l'école secondaire étaient les parmi les prédicateurs les plus puissants de la participation à l'éducation tertiaire au Canada.»

«Cela ne suffit toutefois pas à garantir une parfaite égalité des chances du point de vue des financements. En fait, les étudiants issus de milieux défavorisés sont probablement moins enclins à s'endetter et plus sensibles à l'évolution du coût de l'enseignement.»

«Ces résultats impliquent que la recherche d'un accès équitable pourrait nécessiter des subventions additionnelles pour les étudiants de milieux désavantagés».

«Plutôt que des réductions de droits de scolarité, cela peut être atteint plus efficacement en augmentant la proportion de bourses non remboursables versées directement aux étudiants désavantagés socio-économiquement, étant donné leur plus grande aversion à l'endettement.»

«Comme la participation universitaire augmente avec le revenu familial, l'alternative de baisser ou de geler les frais aurait un effet régressif en procurant de plus grands bénéfices aux bien nantis.»

C'est une étude fouillée, équilibrée, qui a en outre du recul. Tous ceux qui participent à ce débat sur les droits de scolarité devraient la lire, si la raison a encore sa place.