Voici quelques commentaires qui reviennent souvent dans vos courriels à propos de ce projet de charte des valeurs. Je réagis brièvement.
9. C’est une atteinte à la liberté religieuse.
C’est certes une limitation, mais est-elle excessive ? On ne demande pas au fonctionnaire de renoncer à sa foi, mais à son affichage trop visible. Pourquoi ? Parce qu’il incarne un État qui se veut neutre au plan religieux. Même chose pour l’opinion politique du fonctionnaire : on sait qu’elle existe, mais il la garde pour lui.
8. C’est seulement un bout de tissu.
Pour vous, peut-être, mais pour la personne qui le porte, c’est un symbole porteur d’un lourd message : sa croyance est si absolue qu’elle ne saurait souffrir la moindre restriction, même au sein d’un État neutre, et qu’il nous impose de la voir. Dans le cas particulier du hidjab, il en résulte une pression sur les femmes musulmanes qui refusent de le porter.
7. Et si la personne est compétente ?
Aucun rapport. Sur le marché du travail, la compétence est une exigence nécessaire, mais pas nécessairement la seule. Il y a mille exemples d’obligations professionnelles relatives à l’apparence ou à l’attitude.
6. Iriez-vous jusqu’à refuser d’embaucher quelqu’un ?
Porter un signe religieux est une décision individuelle. Les choix individuels comportent des conséquences qu’il faut savoir assumer. Les règles seraient claires à l’embauche. Si la famille oblige quelqu’un à porter un signe religieux, raison de plus pour que la loi vienne protéger son droit de dire non.
5. Aucune crise ne justifie le gouvernement d’agir.
S’il fallait que les gouvernements n’agissent que lorsqu’il y a crise, on les accuserait avec raison d’avoir trop attendu.
4. Le PQ fait un calcul électoraliste.
Il y a de cela, mais pas que cela. Oui, le PQ espère des gains, mais il dit la même chose depuis 2008 et avait pris cet engagement en campagne électorale. Le PLQ fait aussi un calcul politique puisque 95% des votes des communautés culturelles lui sont acquis. C’est aussi par calcul que la CAQ ménage la chèvre et le chou.
3. En maintenant le crucifix à l’Assemblée nationale, le gouvernement se contredit.
En France, pays de la laïcité stricte de l’État, il n’y a pas de crucifix au Parlement. Affaire réglée depuis 1905. Le PQ veut concilier la laïcité progressiste et un brin de conservatisme patrimonial. Pas évident du tout.
2. Le gouvernement contrevient aux lois.
Attendons de voir le projet de loi. Oublie-t-on qu’en démocratie, ce sont les députés qui font les lois ? Les juges sont là pour les interpréter. Oublie-t-on aussi que la Charte canadienne fut imposée au Québec sans son consentement ?
1. Le gouvernement donnera une caution morale à la xénophobie.
Objection sérieuse, mais qui se retourne. En refusant la moindre limitation aux signes religieux ostentatoires, on donne une caution morale à un intégrisme religieux qui y verra un encouragement à aller encore plus loin.