Islam au Canada
Des imams lancent un appel pour la paix
Radio-Canada
Le vendredi 13 août 2010
Une trentaine d'imams canadiens dénoncent l'islam radical dans une déclaration commune en faveur de valeurs comme la paix et l'égalité entre hommes et femmes, présentée comme étant « sans précédent ».
Signée par 38 imams influents, la déclaration en sept points, mise en ligne sur le site web du Conseil canadien des imams, devait être lue vendredi dans des centaines de mosquées canadiennes pour marquer le début du ramadan.
« L'islam est une religion qui fait la promotion de la paix, de la justice, de l'égalité, de la dignité et de la liberté pour tous les êtres humains », peut-on y lire.
Nous croyons à la coexistence pacifique, au dialogue, à la coopération et à la construction de ponts entre les différentes confessions et les peuples pour le bien commun de l'humanité. L'islam ne permet pas de tuer des gens innocents, quelles que soient leur croyance, leur origine ethnique, leur race ou leur nationalité. Le caractère sacré de la vie humaine l'emporte sur les lois religieuses.
— Extrait de la déclaration
L'initiative porte également sur la place de l'homme et de la femme dans la société. « Nous croyons à l'égalité entre les sexes et au droit divin de chaque homme et de chaque femme à recevoir une éducation, à contribuer à la société, à travailler et à être traité avec respect et dignité », ajoute la déclaration.
Ces imams canadiens défendent aussi la liberté de religion ainsi que le droit de déterminer eux-mêmes la façon de se comporter en société, notamment en ce qui concerne la façon de se vêtir, et invite les musulmans à s'impliquer dans leur communauté.
Cette initiative vise à dénoncer les musulmans radicaux qui croient que la violence est autorisée par les préceptes de leur religion. Elle a également pour but de sensibiliser les Canadiens aux valeurs prônées par les leaders religieux musulmans, ajoute l'imam Habeeb Alli, secrétaire du Conseil.
Le président du Conseil, l'imam Hamid Slimi, dit espérer que le point de vue de « la majorité silencieuse » des Canadiens d'origine musulmane sera bien entendu.
Wahida Valiante, présidente-directrice générale du Congrès islamique canadien, précise que les imams qui y sont associés ont tous signé la déclaration.
Elle déplore en outre les représentations négatives de l'islam souvent véhiculées dans les médias. « Les autres communautés religieuses peuvent pratiquer leur religion discrètement, sans avoir à justifier le fait qu'ils sont de bonnes personnes », dit-elle.
Le site du Conseil indique que d'autres signatures s'ajouteront à la déclaration.
Une « occasion manquée »
L'initiative est insuffisante aux yeux de Tarek Falah, fondateur du Conseil musulman canadien, qui y voit une « occasion manquée ».
Il déplore que la déclaration ne plaide pas en faveur de la séparation de la mosquée et de l'État et ne spécifie pas que la mosquée n'est pas un endroit pour mener des activités politiques. Autre faille, selon lui, le document ne demande pas que les femmes puissent occuper la première rangée des mosquées ou devenir des imams. Plus important encore, il ne dénonce pas spécifiquement la théorie du djihad armé, critique-t-il.
Sans ces éléments, affirme M. Falah, la déclaration est « complètement vide de sens ». Selon lui, le Conseil se trompe de cible.
Plusieurs imams au Canada prônent la victoire des musulmans sur les non-musulmans, soutient-il : c'est ce genre d'enjeu dont devrait parler le Conseil. « Ces imams vivent dans un monde médiéval qui leur est propre et ils n'ont pas encore bien compris la crise à laquelle sont confrontés les mondes musulman et occidental ».
L'imam Alli réplique qu'il s'agissait d'un « début sincère ». « Il s'agit d'une tentative visant à nous aider à répondre à quelques-uns de ces enjeux. J'espère que nous pourrons cheminer à partir de ces bases », conclut-il.