Six plantes "tueuses" se retrouvent à Montréal
Le Magazine de L'Île-des-Soeurs
14 juillet 2007
La biodiversité et les milieux naturels ne sont pas seulement menacés par le développement urbain et la pollution.
Voilà que des plantes envahissantes y font leur apparition et gagnent du terrain sur l’île de Montréal, menaçant la flore et l’écosystème.
C’est ce que le personnel du ministère de l’Environnement, de même que des membres du Comité Zone Intervention Protection (ZIP) Jacques-Cartier ont pu constater après une expédition de quelques heures dans l’est de Montréal la semaine dernière. Se déroulant dans les milieux humides, les parcs et sur la berge du Saint-Laurent, cette expédition scientifique a tôt fait de relever la présence de six plantes dites envahissantes. « Seulement dans la coulée Grou, on en dénombre cinq. Et on n’a pas eu vraiment à chercher pour les trouver. Les plantes étaient bien visibles », explique Caroline Girard, d’Environnement Canada.
C’est ainsi que l’équipe a pu apercevoir à cet endroit le roseau commun, l’alpiste roseau, le butome à ombrelle, la salicaire pourpre et la renouée japonaise.
Alors qu’on se questionne à savoir si un jour on pourra de nouveau se baigner dans le fleuve Saint-Laurent et profiter d’espèces récréatives, Environnement Canada souligne que ces espèces envahissantes sont non seulement une menace pour la biodiversité, mais rendent impraticables plusieurs activités récréatives telles la navigation, la pêche, la natation, etc.
« Il faut rapidement trouver des moyens pour limiter leur invasion. Sinon, on va se retrouver avec de gros problèmes. La biodiversité est menacée, tout comme une future présence humaine aux abords du fleuve », souligne Chantal Rouleau, directrice du Comité ZIP Jacques-Cartier.
On qualifie ces espèces d’« envahissantes » car elles se propagent dans les milieux naturels, profitent de l’absence de compétiteurs, de prédateurs ou de maladies pour prendre d’assaut des écosystèmes entiers. « Elles n’ont aucune utilité, explique Mme Rouleau. Elles nuisent à la navigation, aux réserves d’eau potable et à l’usage des lieux à des fins récréatives. De plus, elles ne sont pas nutritives, n’aident pas à l’habitat naturel des animaux et des oiseaux et assèchent les terres ».
Même dans les plates-bandes!
Comme le souligne Environnement Canada, « les espèces exotiques empruntent de multiples voies d’entrée et de dispersion à Montréal : transport maritime et ferroviaire, navigation de plaisance et commerciale, véhicules tout terrain, commerces liés à l’alimentation, l'aquariophilie et jardins d'eau, introductions non autorisées, espèces sauvages migratrices et dispersion passive ».
Un des supports les plus importants à la prolifération de ces végétaux nocifs est l’horticulture. « Les gens trouvent ces plantes très jolies et les mettent dans leurs plates-bandes, laisse savoir Mme Rouleau. Une fois plantées, il est bien difficile de les arrêter. Elles vont prendre rapidement toute la place et finiront par se propager ensuite dans les milieux naturels. »
C’est pourquoi la ZIP Jacques-Cartier s’est vue confier le mandat par Environnement Canada de passer au peigne fin tous les milieux naturels de l’est de Montréal afin de répertorier les espèces envahissantes. « Une fois qu’on aura un portrait de la situation, nous serons en mesure de dresser un plan d’intervention où tous seront appelés à contribuer, le citoyen comme les instances municipales. Il n’est pas trop tard, mais il faut faire vite », dit Mme Girard.
-Phragmite commun: longues tiges (1,5 à 2,5 m) terminées par des plumeaux soyeux et pourprés. On peut en voir le long des routes et des fossés. Le phragmite nuit grandement à la diversité végétale et forme, le plus souvent, de vastes étendues pures, denses et impénétrables.
-Phalaris roseau: plante émergente des hauts marais avec une tige dressée, raide, se cassant facilement. Impact important sur la diversité végétale aux endroits où elle est dominante; elle laisse peu de place aux autres espèces.
-Salicaire commune: plante émergente des hauts marais, bordure des plans d’eau, plages, fossés, canaux d’irrigation et de navigation. La tige est carrée, ligneuse avec des fleurs pourpres ou roses en épi. Forme un tapis très dense. Produit beaucoup de graines (jusqu’à 2,7 millions par année par plante) et n’a pas de prédateur connu.
-Myriophylle à épi: plante submergée des lacs, rivières, étangs, fossés, canaux d’irrigation et de navigation avec des tiges abondamment ramifiées (0,5 à 10 m). Nuit à la baignade et à la circulation en embarcation motorisée, également aux sites de frai de poissons.
-Hydrocharide grenouillette: petit nénuphar. Les colonies sont très denses et privent la colonne d’eau de lumière.
-Butome à ombelle: tige simple de 80 à 100 cm avec des fleurs en ombrelle rose pâle. Peut occuper jusqu’à 50 % de l’aire colonisée. Problème d’envahissement modéré, mais non négligeable.
-Renouée japonaise: l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) l’a inscrite sur la liste des 100 pires espèces envahissantes de la planète. Elle appauvrit la diversité biologique et menace ainsi l’équilibre des écosystèmes aquatiques. Elle perturbe aussi les activités humaines : elle limite l’accès aux cours d’eau et affecte la valeur des terres qu’elle envahit.