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Deux parents canadiens sur trois sont incapables d’aider leurs enfants à faire leurs devoirs

Des parents dépassés

Émilie Côté

La Presse

Deux parents canadiens sur trois sont incapables d’aider leurs enfants à faire leurs devoirs. Au Québec, c’est un parent sur deux.

C’est l’une des conclusions de l’Enquête sur les attitudes des Canadiens à l’égard de l’apprentissage(EACA), dont les premiers résultats ont été dévoilés hier.

Que papa ou maman ignore – ou ait oublié – une règle de grammaire ou la définition d’un polygone concave n’inquiète pas le Conseil canadien sur l’apprentissage, qui a fait l’enquête de concert avec Statistique Canada.

Les résultats de l’enquête ne sont pas négatifs quant au rôle des parents, indique le président-directeur général de l’organisme, Paul Cappon. Leur rôle n’est pas tant d’aider les enfants que de les appuyer. C’est leur rôle de s’assurer que leurs enfants fassent leurs devoirs et qu’ils acquièrent de bonnes habitudes de travail»

La question des devoirs a toujours été controversée (voir autre texte). Des parents craignent de mal répondre aux questions de leur enfant et de leur faire perdre des points», souligne Roch Chouinard, professeur au département de psychopédagogie et d’andragogie de l’Université de Montréal.

Le fait que des pères et des mères peinent à expliquer comment additionner et diviser des fractions, par exemple, ne surprend pas Diane Miron, présidente de la Fédération des comités de parents du Québec. C’est un sentiment partagé par bon nombre de parents. Pour eux, les devoirs sont un casse-tête. La façon dont les choses sont enseignées a changé», explique-t-elle.

Mme Miron est d’accord avec M. Cappon: les parents doivent avant tout épauler et encourager leurs enfants. Ce qu’on attend des parents n’est pas clair, particulièrement au primaire, souligne-t-elle. Des parents pensent qu’ils doivent être professeurs du soir. Ce n’est pas pour rien que tant de parents font appel à des compagnies privées d’aide aux devoirs. Leur rôle est plutôt d’accompagner leurs enfants»

Johanne Fortier, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ), est du même avis. Elle se réjouit de ce résultat de l’enquête: 96% des Canadiens considèrent que l’école doit donner le goût d’apprendre. Les parents comprennent que le but premier est le soutien, l’encadrement et de stimuler le goût d’apprendre. Ils souscrivent au but de faire aimer l’école»

Mais selon l’enquête, un Canadien sur trois (35%) considère que l’école ne donne pas suffisamment le goût d’apprendre aux élèves. Au Québec, moins de répondants –soit 17%– adressent ce reproche aux écoles.

Il y a place à amélioration», signale Paul Cappon.

Selon Mme Fortier, donner l’envie d’apprendre aux enfants ne se fait pas uniquement par le biais de l’enseignement. Il faut des conditions intéressantes pour aimer l’école, fait-elle valoir. L’école doit soutenir des activités parascolaires. Il faut que l’école soit vivante»

La présidente de la FSE-CSQ souligne que certaines bibliothèques scolaires sont dans un état délabré». Pour faire aimer la lecture aux élèves, il faut que les livres soient intéressants».

 

Et la réforme?...

 

Un des buts de la réforme scolaire au Québec vient répondre au fait que des jeunes trouvent l’école plate», souligne Diane Miron. Les devoirs doivent avoir un sens»

Un des buts de la réforme est de donner une signification aux apprentissages. Mais tout ne s’apprend pas que par projet, répond Johanne Fortier. Il faut continuer de répéter ses tables de multiplication».

Avec la réforme, la grammaire n’est plus enseignée de la même façon aux enfants. Par exemple, on ne parle plus de complément circonstanciel, mais tout simplement de complément de phrase. Les élèves ne les trouvent plus en posant les questions où, quand ou comment, mais en déplaçant ou en effaçant un groupe de mots», explique Marc-Antoine Tanguay, enseignant au service d’aide aux devoirs Allô Prof.

De plus en plus de parents contactent Allô Prof (2700 en 2005). Avec les nouvelles stratégies d’enseignement, surtout en grammaire, des parents nous appellent pour mieux comprendre», dit la directrice générale du service, Sandrine Faust.

Allô Prof offre un soutien aux élèves par téléphone ou Internet, du lundi au jeudi, de 17h à 20h. Quand les parents ont de la difficulté avec les devoirs de leur enfant, c’est souvent pour deux raisons, constate Mme Faust. Ou bien ce sont des notions qu’ils ont oubliées ou alors la terminologie a changé»