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“Israël commet des crimes de guerre”

Actualité (Mercredi 02 Août 2006 )

GEORGES Corm analyse la situation au Liban au forum de l’Obs

“Israël commet des crimes de guerre”

Par : Said Rabia
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Pour l’ancien ministre libanais, ceux qui ont tablé sur la division du pays ont échoué.

“Aux yeux du droit international, Israël commet incontestablement des crimes de guerre”. Georges Corm, cet économiste, historien et ancien ministre libanais invité avant-hier au forum qu’organise la version on line du magasine français l’Obs ne mâche pas ses mots pour qualifier ce qu’est réellement la situation dans son pays. Pertinentes, ses analyses donnent une lecture exacte des faits et de l’histoire de ce conflit qui a évolué au fil des ans au gré des transformations qu’ont connues les relations internationales. Même si ses réponses aux internautes sont brèves, Georges Corm situe les enjeux de la guerre que livre l’État hébreu contre le Liban. Il donne son avis à la fois d’expert et de citoyen libanais.
À la question sur l’intérêt qu’ont les États-Unis à laisser cette région dans le K.-O., il répondra que “la politique américaine depuis l’effondrement de l’URSS et surtout les attentats du 11 septembre 2001, vise à affirmer sa domination sur cette région du monde stratégique et vitale, surtout dans sa rivalité avec la Chine. Tout le reste, notamment le discours sur le terrorisme, n’est qu’un habillage de cette politique”. Les intérêts israéliens ? Ils sont, selon lui, “purement politiques”. Il s’agit, dira-t-il, “de faire plier la volonté des Libanais et d’obtenir de leur gouvernement qu’il se plie aux exigences américaines pour un nouveau Moyen-Orient dont nous avons vu les résultats en Irak et en Palestine occupée”. C’est ce  qui explique, en effet, l’action diplomatique américaine et britannique qui rejoint l’offensive militaire israélienne dans ses objectifs, notamment celui qui concerne le désarmement du Hezbollah.
L’ancien ministre libanais soulignera d’ailleurs que cette donne rendra encore “plus dures et longues les négociations de sortie de crise”. À une question sur la stratégie de l’État hébreu qui s’attendait à un éclatement du Liban et au rejet du parti chiite par les Libanais, Georges Corm affirme : “Je pense que Michel Aoun qui est loin de la personnalité chrétienne la plus populaire au Liban a déjà réussi à empêcher un divorce entre la communauté chrétienne et la communauté chiite. Les hommes de la religion sunnite se sont entièrement solidarisés avec le Hezbollah. Je pense que ceux qui projetaient de créer les conditions de division du pays ont échoué. Mais il faut évidemment rester vigilant. Les États-Unis et Israël, par leur politique, contribuent à radicaliser toute la région.” Qu’attend le Liban pour faire le ménage chez lui ? Loin d’être un prosyrien, Georges  Corm tranche : “Nous  ferons le ménage… lorsqu’Israël sera en règle avec le droit international et prêt à vivre en paix avec ses voisins sans martyriser Libanais et Palestiniens.”
La recette de la paix, Corm la livre, par ailleurs, en vrac. Selon lui, “si Israël ne continuait pas d’occuper et de coloniser le Golan syrien et la Cisjordanie et Gaza en infraction aux résolutions des Nations unies et aux conventions de Genève, le conflit régional aurait toutes les chances de s’apaiser rapidement”. Mais dans la partie de bras de fer qui est engagée, estime-t-il, cependant, cette partie risque d’être longue. “Israël ne peut pas se permettre de ne rien obtenir”.
 À propos des répercussions de cette guerre sur les affaires internes du Liban, Georges Corm affirmera que son pays est et restera “un pays multicommunautaire, quoiqu’Israël tente de le faire diviser suivant des plans anciens”. Le Liban, dira-t-il, pour réfuter la thèse qui soutient que si le Hezbollah sort vainqueur de la guerre, il aura encore plus d’influence sur la scène interne, est “un contre-modèle de coexistence et d’interpénétration de communautés religieuses diverses, insupportables pour le modèle israélien bâti sur le monopole d’une communauté et sa domination sur les autres”.

S. R.