La sécurité de l'ambassade du Canada à Beyrouth menacée
Le Montréalais Daniel Bellemare,
procureur général du Tribunal spécial sur le Liban.
Catherine Handfield |
La nomination d'un Montréalais à titre de procureur général du Tribunal spécial pour le Liban pourrait menacer la sécurité des employés de l'ambassade canadienne à Beyrouth, selon un document interne de l'ambassade, obtenu par La Presse.
Dans son bilan annuel de 2007-2008, le directeur du programme d'immigration de l'ambassade canadienne à Beyrouth fait cette mise en garde relative à la nomination de Daniel Bellemare comme procureur général du Tribunal chargé de traduire en justice les assassins du premier ministre libanais Rafic Hariri.
«La nomination du 13 novembre 2007 du juriste canadien Daniel Bellemare à la tête de la commission d'enquête de l'ONU sur l'assassinat de Hariri, ainsi que sa nomination probable à titre de procureur du tribunal spécial pour le Liban, pourraient augmenter la vulnérabilité du personnel canadien au niveau sécuritaire.»
Ce document de 28 pages a été obtenu en vertu de la Loi sur l'accès à l'information par l'avocat en immigration Richard Kurland. Selon lui, le rapport annuel a été soumis par Gilles Perreault, le directeur du programme d'immigration qui était en poste à l'époque.
«Gilles Perreault a bien raison de signaler à Ottawa le danger dans lequel nos Canadiens se trouvent, a dit Richard Kurland, joint à Vancouver. La nomination de Daniel Bellemare a converti les fonctionnaires canadiens en cibles.»
Le troisième procureur
Daniel Bellemare, un avocat québécois, a été nommé, en novembre 2007, chef de la commission d'enquête de l'ONU sur l'assassinat de Hariri, survenu le 14 février 2005. Le 1er mars dernier, cette commission est devenue officiellement un tribunal. Les travaux ont lieu dans les environs de La Haye, aux Pays-Bas.
Daniel Bellemare travaillera officiellement à La Haye, mais une partie de son équipe est toujours à Beyrouth. Il pourra donc être appelé à retourner au Liban, selon Yves Sorokobi, porte-parole du secrétaire général des Nations unies.
Le Québécois, qui a longtemps été sous-procureur général du Canada, n'est pas le premier à s'attaquer au dossier épineux de la mort de Rafic Hariri.
L'enquête avait d'abord été confiée au procureur allemand Detlev Mehlis, qui a affirmé publiquement ses soupçons envers la Syrie pour élucider l'assassinat. Il a démissionné après avoir été informé que deux complots d'assassinat pesaient contre lui. Le Belge Serge Brammertz a pris sa relève en janvier 2006, avant d'abandonner à son tour, deux ans plus tard.
Sécurité renforcée?
Me Kurland espère qu'Ottawa a renforcé les effectifs de sécurité à l'ambassade canadienne à Beyrouth après avoir pris connaissance du rapport annuel du programme d'immigration.
«J'espère aussi que le gouvernement a envoyé une note à tous ses employés de Beyrouth», a-t-il dit.
Le ministère des Affaires étrangères n'a pas été en mesure, hier, de répondre à cette question. Le porte-parole Rodney Moore n'a pu indiquer non plus l'impact qu'avait eu le rapport de l'ambassade au sein du gouvernement.
Sur son site, le Ministère recommande d'éviter tout voyage non essentiel au Liban.