Opinion

Lettres: Le pire danger pour le cycliste...

 

André Joyal, Verdun, le 6 août 2007
Publié dans Le Devoir
Édition du mardi 07 août 2007

Le pire danger pour le cycliste n'est pas celui que l'on croit. Non, ce n'est pas l'automobiliste qui, très souvent, prolonge son arrêt pour éviter au cycliste de mettre fin à son élan. Non, le pire danger, c'est le cycliste qui confond piste cyclable et piste de course.

Jeudi soir, en début de soirée, comme je le fais trois ou quatre fois par semaine, je reviens du parc Jean- Drapeau via l'estacade conduisant à L'Île des Soeurs. Deux petits couloirs sont réservés aux cyclistes avec flèches pour indiquer le sens. Les deux tiers de l'espace demeurent réservés aux voitures qui y circulent en fin d'après-midi et dont les conducteurs ne se gênent pas pour nous invectiver si nous sommes à l'extérieur de notre couloir. Comme c'est très souvent le cas, hier soir c'était très venteux et, dans ces conditions, on roule tête baissée pour favoriser l'aérodynamisme. C'est ainsi que j'ai à peine vu un cycliste, dans le couloir à ma gauche, se prenant pour Rasmussen en train de faire le contre-la-montre de sa vie. Je lève la tête et vois une forme sombre à 100 mètres de moi. Je pense à un cycliste allant dans la même direction que moi et rebaisse la tête. Cinq secondes plus tard, un cycliste me rentre dedans à tombeau ouvert. Propriétaire d'un Marinoni, il devait se prendre pour Vinokourov en mal de rattraper Rasmussen Sa tricherie à lui, c'est d'avoir roulé dans le mauvais couloir.

De bons samaritains s'arrêtent immédiatement. Sur le dos, je perçois rapidement que je ne dois avoir rien de brisé. Un septuagénaire m'aide à me relever et m'offre de son eau et le réconfort de sa conversation jusqu'à ce que je l'invite à poursuivre sa route... la tête relevée. Toujours étourdi, on m'offre de m'asseoir sur le parapet pendant que je constate que le marchand de vitesse semble être en plus mauvais état que moi. Il attendra l'ambulance sur le dos et moi toujours assis. À sa douleur physique doit s'ajouter une douleur morale en étant conscient de son inconscience. Me voyant seul, une femme, qui fut parmi les premiers à s'arrêter pour nous prêter main-forte, s'approche de moi pour me réconforter. Sa main sur mon épaule ma fait du bien quand dans ma jambe il faisait mal (Brassens). Oui, elle fut mon Auvergnate.

Ne pourrait-on pas songer à imposer des limites de vitesse sur les pistes cyclables empruntées par des gens de tout âge? Ce jeudi soir, un enfant aurait pu se faire tuer...

André Joyal IDS