Accommodements raisonnables

Un CPE refuse de satisfaire un enfant musulman

Louise Leduc
La Presse
Le mercredi 04 avril 2007

Il en coûtera ce qu'il en coûtera, mais le CPE Gros Bec, à Montréal, est résolu à livrer bataille devant les tribunaux, jugeant inacceptable de devoir prêter attention au contenu de l'assiette d'un enfant musulman.

L'histoire commence en 2003. Un enfant musulman est admis au CPE Gros Bec où l'éducatrice promet, dans la mesure du possible, de ne pas lui servir de la viande non halal (du porc, notamment). L'éducatrice accepte de veiller à ce que l'enfant, qui n'aura pas droit à un menu spécial, mange plutôt les autres aliments au menu.

Quand la famille inscrit quelques années plus tard son deuxième enfant au même endroit, le CPE refuse de prendre pour lui les mêmes précautions que pour le premier.

«Sur 80 enfants, on a de 12 à 15 enfants musulmans, a dit en entrevue hier Suzanne Marier, directrice du CPE. Les éducatrices ont déjà assez de stress à gérer tous les problèmes d'allergies, on ne va pas en plus leur demander de respecter les diètes religieuses des enfants. Notre CPE est ouvertement laïque, neutre et apolitique.»

Mais pourquoi refuser au deuxième enfant ce qui a été accordé au premier? «Dans le temps, l'éducatrice n'était pas au courant de nos règles. Comme elle avait commis une erreur, on avait décidé de faire exception pour ce seul enfant.»

En janvier, s'appuyant sur la Charte, la Commission des droits de la personne décidait par voie de résolution qu'il y avait eu discrimination et violation de la liberté de religion. La Commission concluait que 4000 $ devraient être versés en dommages moraux à la famille musulmane.

Dernièrement, le CPE Gros Bec a fait savoir qu'il ne se plierait pas à cette résolution et a rendu son refus très public en envoyant des communiqués de presse à la ronde.

Advenant un refus définitif, la Commission procédera comme à l'habitude et représentera le plaignant devant le Tribunal des droits de la personne, qui relève de la Cour du Québec.

Où le CPE trouvera-t-il les fonds pour aller devant les tribunaux? «Ça devrait coûter autour de 15 000 $, et on croit trouver l'argent dans notre budget d'opération», dit Mme Marier.