Fraude universitaireou test?

21 mars 2013 20h45 · Pierre-Yves McSween

J’entre dans le pavillon principal de HEC Montréal. Comme il m’arrive parfois, je saisis un exemplaire du journal étudiant pour me remémorer une autre époque. En ouvrant le journal, j’aperçois une insertion glissée entre la première et la deuxième page de L’Intérêt, dont le numéro est consacré au financement universitaire.

Voici le contenu de l’annonce :

*** MANQUE DE TEMPS ? ***

Avez-vous déjà songé faire faire vos travaux universitaires par un étudiant au doctorat ?

Idéal pour essais, travaux longs, résumés de livres, mémoires ou thèses.

-  Six années d’expérience en ghostwriting

-  Polyvalent en business/finance, sciences sociales, lettres pédagogie.

-  Flexibilité et disponibilité

-  Prix abordables

Travail de qualité

Confidentialité assurée

 Fraude

Je savais que ce genre d’étudiant existait. C’est un secret de polichinelle : des marchands, il y en a dans tous les domaines. Par contre, jamais je n’avais été témoin d’un tel marketing. On croirait un entrepreneur nous vendant sa salade grâce à une annonce publicitaire placée dans une boîte aux lettres.

Ce genre de services est non seulement frauduleux intellectuellement, mais il va à l’encontre même de ce qui constitue la base de pensée désirée d’un doctorant. Lorsque j’étais étudiant au doctorat à l’UQAM, il y avait un cours d’un crédit sur l’éthique et la recherche préalable à l’admission.

Un étudiant acceptant d’écrire des thèses de maîtrise ou des travaux de session à la place de ses clients manque autant d’éthique que ceux-ci. Faire ses travaux, cela fait partie de l’apprentissage. Les documents remis ne sont pas seulement des tâches à effectuer, ils font partie du « comment faire » et de l’apprentissage. La fraude intellectuelle n’est pas souvent dénoncée, elle ne vole d’argent à personne, mais elle constitue une tolérance hypocrite des études supérieures.

Voici donc une traduction libre de l’annonce en enlevant l’amélioration de l’image marketing de la transaction :

*** VOUS AIMEZ TRICHER? ***

Avez-vous déjà songé à faire faire vos travaux universitaires par un étudiant sans éthique qui pourrait être expulsé du doctorat s’il se faisait prendre ?

Idéal pour les étudiants n’ayant pas les compétences nécessaires à l’obtention de leur diplôme et ne voulant pas démontrer l’effort nécessaire.

Six années d’expérience en fraude intellectuelle universitaire.

Polyvalent dans tous les types de plagiats.

J’ai une banque de travaux antérieurs que je recycle.

Pour faire une piastre, je suis toujours là, morale élastique à souhait.

Prix abordables puisque c’est du travail non déclaré à l’impôt.

Travail de qualité par rapport à ce que vous auriez fait puisque vous êtes prêt à payer.

Confidentialité assurée, sauf si je me fais prendre. Alors, vous tomberez avec moi.

Ce genre de services existe là où il y a de la demande. Certains en font même un commerce lucratif. J’ose espérer qu’un tel comportement sera dénoncé.

Ces individus n’ont pas leur place dans le milieu universitaire. Leurs gestes sont aussi choquants et répréhensibles que ceux dénoncés à la Commission Charbonneau.

Dire que les clients de ce sous-traitant risquent leur réputation s’ils se font prendre. Et dans le milieu universitaire, la réputation, c’est la plus grande valeur intangible de l’individu.

 

Note: Je souhaite sincèrement que ce soit un test pour piéger des étudiants utilisant un tel service. Dans le cas contraire, nous devrions être collectivement en questionnement sur la dénonciation généralisée d’une telle pratique.